07.01.10 | LA RÉPUBLIQUE IRRÉPROCHABLE souhaitée par Nicolas Sarkozy, ce doit être ça. En mai 2009, Christophe Tardieu, directeur adjoint du cabinet de l’ancienne ministre de la Culture Christine Albanel qu’il avait suivie depuis le Château de Versailles, avait défrayé la chronique pour avoir transmis à TF1 le mail privé d’un salarié de la chaîne de télé que ce dernier, opposé à la loi Hadopi, avait envoyé à sa députée Françoise de Panafieu qu’elle-même avait balancé Rue de Valois. Jérôme Bourreau-Guggenheim, 31 ans, responsable du pôle innovation web de TF1, en avait perdu son emploi, licencié pour avoir exprimé des opinions « contraires aux déclarations officielles du groupe TF1, notoirement en faveur de cette loi ». L’affaire est aux Prud’hommes.
Quant à Christophe Tardieu, qualifié de « balance », de « délateur » et autres noms d’oiseaux sur Internet, il avait été gentiment suspendu de ses fonctions durant un mois avant de quitter le ministère de la Culture en même temps que sa ministre en juin 2009, remplacée par Frédéric Mitterrand.
De manière assez surprenante, cet ancien inspecteur des finances, par un scoop dont nous avions été à l’origine, avait été retrouvé au mois d’août à la présidence du conseil d’administration du Centre national de la danse (CND) sur nomination du Président de la République. Ce qui avait fait sourire pas mal de monde tandis que Jérôme Bourreau-Guggenheim lui, professionnellement marqué au fer rouge, faisait toujours la queue à Pôle Emploi.
Au mois d’octobre suivant, Christophe Tardieu, comme tout le staff de l’ancienne ministre jusqu’à son chauffeur, avait été décoré de la médaille de l’Ordre des Arts et Lettres.
Jérôme Bourreau-Guggenheim, martyr et star du Net, continuait à s’investir sur le terrain citoyen, lançant son blog www.affairedopinion.com, s’engageant plus que jamais en faveur des libertés sur le web. Ainsi participa-t-il à la rédaction de l’ouvrage « La bataille d’Hadopi » lancé avec humour depuis le Fouquet’s sur les Champs-Elysées, haut lieu de la Sarkozie, le 29 octobre 2009. Puis, quand le Prince Jean, fils du Président, voulut conquérir l’EPAD, à la Défense, Jérôme créa, avec d’autres, le site www.bananarepublique.org pour protester contre l’abus de pouvoir manifeste. Professionnellement, il était question qu’il monte sa boîte.
NUMÉRO 2 DE L’INSPECTION GÉNÉRALE DES FINANCES
Dernier rebondissement en date, et non des moindres, par arrêté du 11 décembre 2009, Christine Lagarde, ministre de l’Economie et reine de Bercy, a nommé Christophe Tardieu, 45 ans, adjoint au chef du service de l’inspection générale des finances. Une promotion spectaculaire qui le place ainsi au deuxième rang de la prestigieuse administration, place qui peut mener loin puisqu’il succède à Philippe Mareine appelé, selon LE MONDE à devenir secrétaire général et directeur du cabinet de Thierry Breton, président-directeur général d’Atos Origin. Poste qui n’a pas pour autant encore fait quitter à Christophe Tardieu la présidence du conseil d’administration du Centre national de la danse. Quel parcours !
Mieux encore, un confidentiel du FIGARO en date du 4 janvier rapporte que ce haut fonctionnaire, rongé par le remords, aurait « décidé de rencontrer Jérôme Bourreau pour l’aider à retrouver un emploi ». Sans attendre le jugement des Prud’hommes, le journal y voit là un poignant happy end. On a presque envie de pleurer tellement c’est beau... la morale est sauve. Aujourd’hui, vers 13h sur Twitter, Jérôme Bourreau-Guggenheim affirme, pour l’heure, n’avoir été contacté par personne.