07.10.09 | DEPUIS QUE LA PRESSE étrangère s’est emparée avec passion du sujet de l’implantation d’un McDo dans le Carrousel du Louvre, la direction du musée a bunkerisé sa communication, n’hésitant pas à accoucher du plus gros des mensonges : elle n’aurait rien à voir avec ce centre commercial et les Enseignes qui s’y trouvent. Faux, archi faux.
Dans un premier temps, produisant un communiqué cité dans le DAILY TELEGRAPH du 5 octobre, le musée se veut rassurant et dit s’être assuré que le projet présenté par McDonald’s soit « conforme à l’image du musée », l’entreprise, nous dit-on, ayant « pris le plus grand soin pour assurer la qualité du projet, tant en termes culinaires et esthétiques ». Rappelons qu’à l’origine, la Galerie ne devait accueillir que des boutiques de luxe ou à vocation culturelle [1].
Puis, le soir même, après le tsunami médiatique venu du monde entier, le musée fait marche arrière et fait dire par son service communication que le Carrousel est une société privée et qu’il n’a rien à en dire. Une dépêche de l’ASSOCIATED PRESS rapporte la nouvelle position du musée : « Spokeswoman Aggy Lerolle said only that it is not up to the museum veto McDonald’s arrival since the Carrousel is run by a private company rather than the state-run museum. » Aujourd’hui, dans LE PARISIEN, la direction du musée va encore plus loin, déclarant : « Le Carrousel est un espace totalement privé, sans rapport avec le musée. Le Louvre n’a pas à se prononcer sur les choix du gestionnaire ».
ÉCRIT DANS LE CAHIER DES CHARGES
Pourtant, il suffit de se plonger dans les rapports d’activité officiels du musée du Louvre tous en ligne sur son site Internet pour lire le contraire. Extrait de notre article « McDo au Louvre, une faute de goût » et reproduction ci-dessous d’une page du rapport 2007 qui ne laisse aucun doute :
Les terrains appartenant à l’Etat, depuis janvier 2000 il en a confié l’exploitation à la société ESPACE EXPANSION filiale 100% d’UNIBAIL, spécialiste européen de l’immobilier commercial, qui gère le centre à travers la SAS du Carrousel du Louvre [2]. Cette société reverse des dividendes au musée comme l’ensemble des concessionnaires présents sur le site [3]. Le musée est chargé de faire respecter les accords passés avec l’Etat et notamment « la nature et la qualité des commerces » autorisés, tel que défini par le cahier des charges du bail à construction qu’on serait curieux de voir.
La direction du musée suit de près l’activité de la galerie commerciale, à travers, depuis 2005, son service Valorisation du domaine [4]. Le musée mène des actions conjointement avec ses Enseignes : offres exclusives, permanentes ou d’ordre événementiel, réservées au personnel du musée ou aux Amis du Louvre. Elle observe avec intérêt le développement économique de ce qui, pourtant, n’a strictement rien à voir avec l’objet de sa mission culturelle, comme les campagnes de communication de la galerie pour en « promouvoir la dimension shopping », le succès de l’implantation de telle ou telle Enseigne ou encore la tenue de soirées shopping privé « de plus en plus reconnues et fréquentées » organisées par exemple par le magazine MARIE CLAIRE [5].
[1] Le magazine GEO n°165 - nov. 1992 consacré au Grand Louvre indique que la « galerie marchande (...) sera une vitrine de l’artisanat de qualité » quand la très officielle Revue du Louvre et des musées de France du second semestre 1989, consacrée entièrement au « nouveau visage du Louvre » indique que ses « activités commerciales seront réglementées et limitées aux activités culturelles et touristiques essentiellement ».
[2] A son ouverture en 1993, son exploitation avait été confiée à la GÉNÉRALE DES EAUX. CF « Le « Carrousel du Louvre » ouvre ses portes au public », LES ÉCHOS n°16497 | 14.10.1993.
[3] Le Rapport d’activités 2007 du musée du Louvre indique le chiffre annuel constant de 45 734 euros depuis 2004 reçus de la SNC Carrousel du Louvre, ce qui paraît bien peu au regard du CA global. Peut-être ne comprenons-nous pas ce tableau en p.310 intitulé « Recettes de la valorisation du domaine en 2007 ». Les recettes perçues pour toutes les activité relevant du service de valorisation du domaine s’élevaient à 5,68 M€ en 2007, redevance augmentant d’année en année : + 38,73% depuis 2004.
[4] « Le service valorisation du domaine travaille dans une optique d’adéquation maximale entre les offres commerciales, les objectifs culturels et financiers du musée, et les attentes d’un public exigeant et hétérogène » indique le Rapport d’activités 2006 du musée. A cette fin, il s’est doté d’un « baromètre des consommateurs » qui permet de « piloter l’activité des concessions à partir d’indicateurs qualitatifs et quantitatifs pertinents, d’anticiper et/ou de réajuster les offres de services afin d’augmenter la satisfaction des visiteurs vis-à-vis des espaces concédés du domaine ». Il gère directement les concessions intra-musée et suit les activités de la galerie du Carrousel à travers la SNC.
[5] Rapport d’activités 2007 du musée du Louvre.