Consultez notre dossier complet « No photo au musée d’Orsay », rejoignez le groupe OrsayCommons sur Facebook et continuez à protester sur le livre d’or virtuel du musée d’Orsay.
11.06.10 | IL N’Y A PAS LONGTEMPS, le Louvre s’y était essayé. En vain. Après avoir interdit durant quelques mois toutes photos dans la partie la plus visitée du palais, le musée y avait renoncé [1]. Par impossibilité de faire appliquer la mesure. D’un point de vue humain, les gardiens devenaient fous à courir après tout le monde, comme d’un point de vue technologique, chaque téléphone portable comportant désormais un appareil photo. Le musée d’Orsay argue du même prétexte pour éradiquer ce geste ô combien contemporain : des problèmes de circulation dus aux prises de vue des visiteurs. Phénomène d’embouteillage qui ne gêne plus du tout la direction du musée dans les espaces d’exposition temporaire à succès où pourtant la photo, de manière constante, est interdite. Là, aucune mesure n’est prise et il devient infernal, compte tenu de la densité de la foule, de visiter ce type d’exposition. Pas plus qu’elle n’est gênée par des visiteurs plantés devant un tableau, l’audioguide à l’oreille.
A l’heure des blogs où chacun fait partager sa passion et ses voyages, de la multiplication des sites de partage de photos, des pages de fans sur Facebook, autant d’initiatives qui vont dans le sens d’une démocratisation culturelle, le musée d’Orsay surfe complètement à contre-courant et se referme sur lui-même. C’est d’autant plus drôle que les musées multiplient les visites privées de blogueurs pour qu’ensuite ceux-ci fassent la promotion des lieux, avec force photos. Dans le même temps, l’établissement public du Château de Versailles remet ses prix aux photographes amateurs ayant participé à son concours « Reflets de Versailles » et le Muséum de Toulouse organise pour la seconde année un concours photo.
Quand le Louvre, en 2005, avait tenté l’interdiction, Didier Rykner de LA TRIBUNE DE L’ART, tout en dénonçant l’illécité de la mesure pour des oeuvres appartenant au patrimoine public, avait tout de suite pointé sa vraie raison : « protéger encore davantage la manne que représentent les droits photographiques ». Et inciter le visiteur lambda à acheter toujours plus de cartes postales dans les boutiques du musée, l’une des ventes les plus substantielles.
Au musée d’Orsay, défiguré par les affichettes d’interdiction se dressant tous les dix mètres, l’absurde veut qu’on ne peut même plus prendre en photo, ni filmer le bâtiment lui-même, ce hall de gare incroyable, avec sa verrière et son horloge impressionnante. Fini.
Dans un tract datant d’avril 2010, la section CGT du musée d’Orsay explique bien la situation et montre comment la direction prend prétexte du confort des agents de surveillance dont les conditions de travail sont actuellement très difficiles du fait d’importants travaux dans le musée, pour imposer une mesure liberticide, le syndicat rappelant deux évidences :
Enfin, selon la direction, même les visiteurs seraient satisfaits de l’interdiction qui leur est faite ! Aussi n’hésitez pas à vous plaindre, sur place auprès du personnel, en écrivant sur le livre d’or à disposition au comptoir d’information à l’entrée du musée ou sur le livre d’or virtuel sur son site Internet si les messages ne sont pas censurés. Et, par sécurité, envoyez-nous copie de vos messages de protestation à contact@louvrepourtous.fr.
« La pratique photographique, révélateur des échanges entre visiteurs » par Mélanie Roustan, chercheur associé au CERLIS | 2007
« Un nouvel interdit au musée : la photographie ? » par Serge Chaumier et Véronique Parisot, Centre de Recherche sur la Culture et les Musées | 2008
« Photographie, musée et pouvoir : formes, ressorts et perspectives » par Elsa Olu, muséologue, La Lettre de l’OCIM 117 | 2008
Je me sens tout à fait concernée par votre démarche et vos évidences décrites ci-dessous :
1 - ... « Elle interdit désormais à un amateur d’art de conserver l’empreinte visuelle de ses visites culturelles, à un étudiant d’illustrer son mémoire de Master, à un lycéen de personnaliser son devoir d’histoire des arts, à une famille de se photographier devant la maquette de l’Opéra, à des enfants de s’entrephotographier devant l’Ours blanc de Pompon, etc... »
2 – C’est une atteinte à la liberté d’expression. Une photographie, même amateur, est définie par le code de la propriété intellectuelle comme une oeuvre de l’esprit. L’interdiction fait obstacle à la primauté du droit à l’information, qui concerne aussi les blogueurs reconnus pour diffuser de l’information. La Cour de justice en fait même une valeur constitutionnelle en déclarant que cette liberté des blogs contribue « à l’échange d’idées et d’opinions indispensable à une société démocratique ».
J’ajouterais qu’en diffusant nos visions très personnelles et artistiques en qualité de créatif, nous ajoutons une dimension ludique et partagée ! En communiquant sur les réseaux sociaux, nous stimulons souvent l’envie de découvrir l’exposition que nous mettons en valeur par notre pertinence créative ! Ainsi nous créons de l’animation, autant que l’expo rend vivant le musée ! et en plus nous faisons de la pub gratuite !!!
Par ailleurs pour les personnes atteintes d’un handicap, c’est un complément participatif et socialisant. Surtout pour le handicapé à caractère « cognitif », la photo est une action visuelle extrêmement importante pour ancrer dans sa mémoire ses émotions et garder à disponibilité ses impressions, les faire revivre à son rythme sans se déplacer (fatigabilité) et les partager. Son vécu garde ainsi une trace valorisante grâce à ses propres photos qu’il y fait.
Aussi je souhaite me joindre à vous pour ce combat !
Si vous voulez enrichir votre bibliographie, je vous conseille l’article d’Anne-Laure Stérin « Un musée peut-il interdire de photographier » publié dans la revue Documentaliste Sciences de l’information volume 48 n°1 paru le 20 avril 2011.
Merci à vous. Nous avons bien entendu eu connaissance de cette brillante démonstration que nous avons notamment signalée dans cet article http://www.louvrepourtous.fr/La-Federation-des-Amis-de-musees,662.html
[1] La mesure entra en application le 14 septembre 2005 et concernait la Galerie d’Apollon, l’ensemble des salles de peintures du 1er étage de l’aile Denon (salles de peintures italiennes, espagnoles et françaises) et le palier où est exposée la Victoire de Samothrace. Nous ignorons la date exacte du rétablissement du droit de photographier.