6 juin 2010 | ENCOURAGÉ par un ministère de la Culture qui n’a que faire de la loi qui stipule que « les droits d’entrée des musées de France sont fixés de manière à favoriser leur accès au public le plus large » [1] et d’une presse indifférente à ces questions bassement matérielles, l’établissement public du Château de Versailles peut continuer en toute tranquillité son travail de sape visant à éliminer tout ce qui pourrait avantager les visiteurs assimilés à des clients, au pire à des pigeons.
Après avoir, depuis janvier de cette année, complètement forfaitisé son billet d’entrée en y incluant de force la visite du château, des expositions et de l’audioguide - 15€ contre 7,50€ en 2005 -, sa direction a voté le 28 avril dernier, en conseil d’administration, la suppression de la réduction valable pour tous après 15h. Celle-ci s’élevait à 13€ et avait déjà été augmentée en 2009 à deux reprises, passant de 10€ à 11,50€. A charge aux agents d’accueil et caissiers d’expliquer cela aux visiteurs, déjà en première ligne pour toutes les récriminations.
La disposition, respectueuse pour le visiteur, se justifiait par la logique de le faire moins payer en fin de journée car disposant de moins de temps pour profiter des lieux. Cette réduction tarifaire existait depuis longtemps à Versailles et existe toujours dans les grands musées publics dignes de ce nom comme au Louvre (9,50€ / 6€ après 18h, réduction supprimée en 2010) ou à Orsay (8€ / 7€ après 16h15, 18h le jeudi).
De même la réduction à 6€ valable pour tous après 16h au Domaine de Marie-Antoinette a, semble-t-il, été supprimée dans la foulée pour laisser place à un tarif unique de 10€.
UNE FRÉQUENTATION TOUJOURS EN BAISSE
Ces mesures logiques avaient, en outre, la vertu d’être incitatives pour ré-équilibrer la fréquentation qui se concentre essentiellement le matin, chose dont se plaint régulièrement avec raison Jean-Jacques Aillagon et qui crée ses files d’attente interminables et régulières que sa gouvernance n’a pas réussi à éliminer. Supprimer ces réductions est donc tout à fait paradoxal et risque de s’avérer contre-productif.
Ces augmentations visent en fait à compenser la baisse de fréquentation du domaine : moins 4% en 2009 par rapport à 2008, soit 200 000 visiteurs de moins, donnée zappée par les journalistes ayant dressé un bilan du premier mandat de M. Aillagon fait uniquement de records de fréquentation, ce qui était totalement faux. La chute s’est poursuivie début 2010 de manière inquiétante : moins 9% en janvier et février par rapport à 2009, moins 36% par rapport à 2008. Avec une pointe au Domaine de Marie-Antoinette de moins 49% ! De même, les visites-conférences ont accusé une baisse importante pour la même période de moins 28% par rapport à 2009 et de moins 46% par rapport à 2008.
La CGT, majoritaire aux dernières élections des représentants du personnel de l’établissement mais seconde, en nombre, au conseil d’administration derrière la CFDT, a voté contre ces dispositions considérant « que les pertes de fréquentation ne doivent pas être compensées par des hausses tarifaires, car cela est un obstacle à la visite pour de nombreux visiteurs et qu’à terme (...) cela nuira aux finances de l’établissement », estimant que ces baisses de fréquentation pourraient bien être dues, en partie, à des prix prohibitifs [2]. Du bon sens ignoré visiblement par les boutiquiers qui gouvernent le Château.